C’est l’histoire d’amour d’un incel pilule rouge et d’une clean girl devenue insipidement dangereuse

Cher journal, ne reste-t-il plus que des masculinistes et des hommes en pantalon beige à épouser ?

Je peux l'essayer en L ?
5 min ⋅ 11/06/2025

À Bruxelles, la météo veut nous faire croire qu’on est encore en mars. Mais mes envies vestimentaires et
mon agenda me certifient que juin est bel et bien là. Du coup, j’ai validé mon panier de pantacourts ultra moulants et j’ai refait le plein de mes produits de skincare, ceux qui m’empêcheront de briller comme la coupe de Roland-Garros, cet été.
Et vous savez ce qu’il se passe en juin ? Une tonne et une tonne de mariages. Euphoriques, tout le monde se dit oui, et la ville est tellement envahie de klaxons et de cortèges de voitures enrubannées qu’on pourrait jurer que tous les jours sont un dimanche à Bamako.

Ayant grandi dans les stands des festivals et les concerts de Sean Paul, la nuisance sonore ne m’a jamais empêchée de trouver le sommeil. Et la romantique qui hiberne confortablement en moi s’extasie devant tant de griserie. Tout ça me redonne foi en l’humanité. Parce que oui, il y a trop de violence.
Oui, il y a trop de racisme. Oui, la montée du fascisme. Oui, le prix exorbitant des raisins rouges et des yaourts à la vanille… Mais tous les jours, des simples mortels se promettent de s’aimer pour l’éternité (ou du moins, jusqu’à ce que l’euphorie et l’ocytocine redescendent), et ça me rend profondément heureuse.
Mais il y a deux semaines, à l’une de mes deux séances sportives hebdomadaires, j’ai découvert que le bonheur des uns mettait littéralement en rage tout un pan des autres. Entendons-nous bien : je n’ai pas appris sur un tapis de course que beaucoup trop d’hommes méprisaient les femmes. Il suffit de scroller quelques minutes sur n’importe quel réseau social pour s’en rendre compte. Mais entre deux foulées, pente 4.5, je suis tombée dans un univers fait de ressentiment, de rancœur et de haine. J’ai appris l’existence des Stacy, des MGTOW, des hamsters… et de la red pill, la fameuse pilule rouge qui permettrait à la gent masculine — bafouée et émasculée par des années de féminisme écrasant cuisiné à la sauce MeToo — de redevenir les mâles alpha qu’ils auraient toujours dû être, et de voir enfin clair dans les mensonges et manipulations des femmes, qui ne seraient en réalité que des êtres superficiels et vénaux qu’il faut dominer à tout prix.

« Tout ça ? », me direz-vous. Bah oui ! Vous ne le saviez pas ? Nous, les êtres humains à nénés, avons eu le mauvais rôle dès qu’Ève a eu le malheur de croquer la pomme. Depuis la descente forcée du jardin d’Éden, on a été des sorcières, des dévergondées, des meufs qui l’ont quand même un peu cherché, des hystériques, des possédées, des poisseuses, des traînées, et j’en passe. Mais comme l’a dit Tony Montana (et Nicki Minaj) dans son costard noir à nœud pap’ :
« Vous avez besoin de gens comme moi. Vous avez besoin de gens comme moi pour pouvoir me pointer du doigt et dire : c’est eux, les méchants. »

Eh oui, c’est nous, les méchantes, les exigeantes, les castratrices. Celles qui demandent plus, qui attendent plus et qui savent qu’elles méritent plus. Celles qui veulent que le conte de fées soit livré avec la garantie et sans période d’essai. Celles qui veulent recevoir énormément parce qu’elles ont beaucoup trop à offrir.
Ce n’est pas que sur un cou large et sexy qu’on veut les papillons. On les veut aussi dans le ventre (et sur notre appli’ bancaire).

Une trend qui ne trend plus si bien que ça : Es-tu une Clean Girl ou simplement une meuf qui a peur de faire des vagues ?

Après mon heure de cardio, j’ai fermé YouTube, j’ai laissé les virilistes là où ils sont, et je me suis demandé si Morpheus, avec ses mini lunettes rondes clipables et son trench en peau de reptile hors de prix, aurait pu imaginer que ses allégories de pilules bleues et rouges allaient être reprises par des hommes qui veulent nous faire culpabiliser de ne pas pouvoir s’envoyer en l'air.
S’il avait su tout ça, aurait-il quand même envoyé Néo suivre le Lapin Blanc ?
Et en parlant de sortir de la matrice, j’aimerais vous dire que j’en ai un peu marre du beige et de cette obsession qu’ont la plupart des influenceuses françaises de paraître chic, discrètes, old money et classes.
Si certaines ont déjà sauté à pieds joints dans le retour décadent de l’indie sleaze, l’opulence des mob wives et la trash attitude des brat girls, on ne peut nier qu’un vent d’uniformité et de tradition minimaliste souffle sur l’univers des influenceuses beauté et lifestyle. Et qu’est-ce que c’est chiant !

@madeleine.nvkThe clean girl aesthetic isn’t just about skincare and slick buns, it’s a symptom of a bigger problem and is rooted in neoliberal bullshit: selling wellness as a lifestyle, creating highly controlled beaty standards, and pushing this empty version of femininity where looking effortless is wrong even becomes fake. But it gets darker. It brings back ideas that echo historical fascism: obsession with purity, control, silence. It rewards girls for being quiet, « white », skinny, polished, and never too loud. It’s not empowering, it’s the same old system that was marketed in beige. Conservatives have always wanted women to look and act a certain way: quiet, pretty, and easy to control. The clean girl trend fits that perfectly. The clean girl aesthetic is problematic because it promotes a eurocentric ideal of beauty that excludes women with textured hair, darker skin, or cultural styles. It reinforces old-school, conservative gender norms. Makes everyone become clones of society#cleangirlstop#cleangirl#stopcleangirl#fucktrump#hate#messygirlsonido original -

Mais si ce n’était que ça, j’aurais pu passer outre, puisque chaque femme est libre d’être qui elle veut.
Mais on ne doit pas oublier que la beauté est toujours politique. Malheureusement, et souvent inconsciemment, on trouve majoritairement beau ce qui est politiquement correct et jugé socialement acceptable.
Et aujourd’hui, le monde de l’influence semble vouloir faire la guerre à la vulgarité et à tout ce qu’on lui associe : fessiers bombés, grosses lèvres, décolletés imposants…
Les célébrités, autrefois connues et célébrées pour leurs rondeurs, se vantent maintenant d’avoir enlevé toutes leurs injections, et d’autres sont suspectées d’avoir radicalement perdu du poids grâce à l’Ozempic ou autres.
Ce n’est pas le fait de vouloir maigrir ou redevenir plus naturelle qui pose problème. Là où ça hérisse les poils, c’est quand on recommence à associer la minceur à l’élégance. Parce qu’avec la minceur vient très vite le culte de la beauté eurocentrée.
Et c’est ce que de plus en plus de journalistes et de blogueuses reprochent à l'aesthetic de la Clean Girl.


En vrai, qui peut être contre un chignon bien tiré, un full face qui n’a pas l’air d’en être un,
un legging rose pâle et un matcha à emporter ? Personne !
Sauf si ce look, et tout ce qu’il prône involontairement, se rapproche un peu trop de l’idée que se font les conservateurs — et, pire encore, les fascistes — de la beauté idéale.
Parce qu’on le veuille ou non, dans l’imaginaire collectif, la Clean Girl est blanche, mince, naturellement belle, fan de beige et de crème, ne fait pas de vagues, et est tellement discrète qu’elle en oublierait presque son individualité.
Et pour certaines, elle représenterait le retour fracassant (et horrifiant) des normes conservatrices qui rêvent d’une féminité porcelaine, docile et policée.

Mais de quoi parle-t-on là ? On est toujours sur la trend qui fantasme sur la couleur du lip liner d’Hailey Bieber ?

Oui et non. Des penseuses, beaucoup plus studieuses que moi, ont réalisé que le succès de la Clean Girl coïncidait avec la montée du néofascisme.
Et ce n’est pas une coïncidence, quand on sait que les mouvements nationalistes blancs véhiculent souvent une image aseptisée de leur femme idéale : pudique, vertueuse, et avec très peu de blush.
Que ce soit la popularité des tradwives ou le retour de la minceur extrême, tout cela est lié à une vision étriquée de la beauté, de la classe, et de ce que doit être une femme. Et à ça, on dit « stop ! ».
Arrêtez de nous saouler avec vos robes à inspiration Sandro, et arrêtez de nous répéter que, depuis que Kylie Jenner et Kim Kardashian ont diminué le volume de leur popotin, les rondeurs sont has been.
Le corps des femmes n’est pas une trend. La minceur n’est pas synonyme d’élégance.
Et les femmes à gros seins ne sont pas plus vulgaires que les autres. Qui décide de l’échelle de la décence vestimentaire ? Qui a dit que l’ordre, la propreté et la beauté naturelle étaient plus désirables que l’exubérance et les couleurs criardes ? Des gens dont on se fiche royalement de l’avis.
Alors, est-ce qu’on va contrer le fascisme avec une mini-jupe à clous et des collants déchirés ?
Peut-être pas. Mais ça ne fait pas de mal d’essayer.

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Je peux l'essayer en L ?

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Par Coumbis Hope Lowie

J’aime les petites fermes perdues dans la campagne bruxelloise, les sacs d’épaule de couleur vive, l’histoire de la mode, les potins mondains, la skincare et les journées tellement remplies et excitantes que tu n’as pas le temps de checker ton téléphone (et encore moins tes mails).

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